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Qu'est-ce que la bioéthique ?

Le terme bioéthique (issu de l'anglais bioethics) date des années 1970. Il a été utilisé par le biologiste américain Van Rensselaer Potter, dans l'ouvrage Bioethics : Bridge to the Future. Pour faire rapidement, on peut définir la bioéthique comme le produit de la confrontation de l'éthique au fait technologique et à sa croissance exponentielle.

Depuis la seconde guerre mondiale, la marche vers la connaissance de plus en plus fine des structures du vivant qui avait débuté au siècle précédent s’est accélérée de manière impressionnante. On est passé de l’histologie, à la structure cellulaire puis moléculaire des tissus vivants. Le support de l’information génétique a été décrit par James Watson et Francis Crick sous la forme de la double hélice d’ADN, en 1953. La découverte de l’ARN messager par François Jacob et Jacques Monod a ensuite ouvert la voie à la compréhension des interactions entre le support moléculaire de l’information génétique et le fonctionnement biochimique de la cellule, au carrefour de la génétique, de la biologie, du génie moléculaire et des théories de l’information. Le décodage du génome humain, la découverte de l’épigénétique (c'est-à-dire des mécanismes de régulation des gènes) et des polymorphismes génétiques ont donné une réalité physique à l’identité du sujet biologique. Parallèlement, les capacités d'interventions médicales ont, elles aussi, connu une croissance exponentielle à partir des années 1950. Les antibiotiques, la réanimation, les greffes ont été les premiers acquis, laissant penser pendant quelques temps que l'on pourrait un jour sauver tous les patients. La fécondation in vitro (FIV), la possibilité de congeler des spermatozoïdes, des embryons, puis plus récemment des ovocytes ont profondément modifié les rapports à la procréation et à la filiation. Les possibilités de dépistage génétique, mais surtout les possibilités d’intervention sur la structure du génome ont réactualisé les questions de la médecine prédictive, de l'eugénisme, voire du transhumanisme. Les avancées des neurosciences ont bousculé les représentations des maladies neurologiques et du support biologique de la conscience.

La seconde caractéristique de la bioéthique réside dans le rôle actif de l'opinion publique. Réceptive aux problématiques nouvelles par le biais de lanceurs d'alertes, l'opinion publique est marquée par une grande ambivalence où cohabitent une certaine défiance collective vis a vis de la science et des technologies avec de très grands espoirs sur le plan individuel. A plusieurs reprises le débat bioéthique a pris une forme stéréotypée : d'abord un lanceur d'alerte issu du milieu technique qui interpelle l'opinion publique qui s'en émeut, puis la création d'un "comité ad hoc" composés d'experts chargés de proposer des limites, suivie de  l'adoption d'un moratoire provisoire plus ou moins contraignant. C'est sur ce modèle qu'en France, la naissance d'Amandine, le premier enfant issu d'une FIV, en 1982, a été à l'origine de la création du comité consultatif national d'éthique (CCNE) en 1983.

Histoire des lois de bioéthique

Source: la documentation française

Depuis 1994, en France, les questions éthiques posées par les découvertes scientifiques et techniques et leur application pratique dans le domaine du vivant et de la santé humaine sont encadrées par les lois dites "Lois de bioéthique" dont la caractéristique commune est de prévoir une révision à un terme convenu et à la suite d'états généraux de la bioéthique. 

Les lois de bioéthique de 1994 contenaient l'affirmation des principes généraux de protection de la personne humaine qui ont été introduits dans le Code civil, des règles d'organisation d'activités médicales telles que l'assistance médicale à la procréation ou les greffes, ainsi que des dispositions relevant du domaine de la santé publique ou de la protection des personnes se prêtant à des recherches médicales.

La révision de 2004 a donné lieu à la loi n° 2004-800 du 6 août 2004 relative à la bioéthique. Les principales dispositions cette loi étaient les suivantes :

  • la création de l'Agence de la biomédecine 
  • l'interdiction du clonage, reproductif ou thérapeutique ; 
  • l'interdiction de la recherche sur l'embryon et les cellules embryonnaires sauf, par dérogation, si elles étaient susceptibles de permettre des "progrès thérapeutiques majeurs ;
  • l'élargissement du cercle des personnes pouvant procéder à un don d'organe pour une greffe ;
  • l'autorisation de la prise de brevets pour des inventions permettant des "progrès thérapeutiques majeurs" et limitée à 5 ans.

La révision de 2011 a donné lieu à la loi n° 2011-814 du 7 juillet 2011 apportait les modifications suivantes :

  • l'autorisation du don croisé d’organes : deux personnes, candidates au don pour un proche mais incompatibles avec leur proche malade, pouvaient s’échanger leur receveur respectif s’ils leur sont compatibles.
  • Une nouvelle définition des modalités et les critères permettant d’autoriser les techniques d’assistance médicale à la procréation et d’encadrer leur amélioration. Ainsi la vitrification ovocytaire ultra rapide était autorisée.

La révision de cette loi doit avoir lieu cette année 2018, sous la forme d'une proposition de loi de la part du gouvernement. Elle doit être précédée d'un débat national sur les questions d'ordre éthique qui se posent aujourd'hui dans le champ des pratiques biomédicales.

Les états généraux de la bioéthique

Le choix technique des législateurs français d'opter pour une loi précise, détaillant les techniques autorisées ou interdites, plutôt que pour une loi-cadre indiquant les principes à respecter et les écueils à éviter qui aurait laissé plus de champs aux bonnes pratiques et plus de souplesse face à l'évolution des connaissances, entraîne la nécessité de révisions régulières. Bien qu'elle donne à la législation française un aspect éternellement provisoire, ce choix permet d'associer la population au dispositif législatif sous la forme d'une obligation d'organiser des états généraux de la bioéthique, sous l'égide du CCNE, avant chaque révision.

Rédigé en 2008, avant la révision de 2011, l'avis n° 105 du conseil consultatif national d'éthique définit les objectifs, les enjeux et le cadre du débat public qui sont toujours d'actualité pour la révision de 2018.

Le processus en 2018

Il s'agit d'ouvrir un vaste débat national sur les questions d'ordre éthique qui se posent aujourd'hui dans le champ des pratiques biomédicales, en mobilisant de nombreux participants à l'échelle nationale lors du premier trimestre de 2018Le processus a été ouvert par le Président du CCNE le 18 janvier lors d'une conférence de presse. Les états généraux de la bioéthique comprendront plusieurs types de consultations organisées :

  • la création de groupes de travail au sein du CCNE ;
  • la consultation des instances éthiques institutionnelles (CNRS, INSERM, Académie de médecine, Académie de sciences...) ;
  • la consultation des autorités religieuses et des représentants des grandes familles de pensée ;
  • des consultations de citoyens.

Les Espaces de Réflexion Éthique Régionaux, qui ont statutairement des missions d'information et de sensibilisation à la fois des professionnels et du grand public, ont été sollicités par le CCNE pour l'organisation de cette réflexion populaire. Les dates des événements publics organisés dans les Hauts-de-France seront publiées progressivement sur cette page. Les renseignements concernant les travaux groupes fermés seront publiés sur cette page.

Les comptes-rendus des diverses manifestations seront transmis au CCNE sous une forme normalisée au printemps 2018 afin qu'il en rédige une synthèse qui sera transmise au gouvernement et à l'office parlementaire  d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST).