Désemballement

Auteure : Claudie Helsens, MD

Mercredi 1er avril, mon confrère Christophe Ruffin, invité de France Culture, disait ceci "un gouvernement qui nous explique que les masques ne servent à rien parce qu'il n'y en a pas, tout simplement. Que les tests ne servent à rien parce qu'il n'y en a pas. C'est un peu triste... "

J'affirme que c'est plus que triste, c'est à rendre fou.

Au début du confinement, obligation de s'approcher des patients suspects de COVID-19 avec des surblouses, gantés, masqués, charlottés, lunettés, décision de mise en bière immédiate si décès. Une semaine plus tard, en EHPAD, un masque chirurgical, un simple tablier plastique, une friction hydroalcoolique avant et après la mise des gants, c'est suffisant pour entrer dans les chambres suspectes de COVID-19.

On nous dit qu'il est impératif de changer le masque toutes les 4 heures. Un masque par soignant et par poste de 12h, voilà la première dotation.

On nous dit (algorithme officiel) : en EHPAD, dépistage systématique des trois premiers cas suspects COVID . Dans les faits : pas de test, pas de dépistage.

On nous dit : "Non aux petites douceurs ramenées par les familles (gâteaux secs, fruits yaourts)". Nous appliquons la quarantaine du yaourt, mais pendant ce temps, au journal de 20h, on célèbre fort justement ces cadeaux faits aux soignants : pizzas, viennoiseries, plats préparés, passant de la main à la main. A penser que le COVID sélectionne ses hôtes ?

Nous sommes face à une impasse logique, une aporie, fruit de l'agitation, de la précipitation.

La peur du médicolégal entraîne des prises de décisions rapides et sous contrainte. Le principe de précaution semble nous faire perdre la raison. Toute cette agitation nous rend inapte à penser. Oui, je pense à la banalité du mal  [1].

Peut-être qu'une façon de terrasser ce virus sans cervelle est de ne pas d'utiliser son arme, la vitesse. Pourquoi ne pas utiliser notre cervelle pour un désemballement curatif ?

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1. Hannah Arendt, Rapport sur la banalité du mal, 1963

• Claudie Helsens est médecin au groupe hospitalier Seclin-Carvin