Le soin la nuit à l’hôpital - Le contexte nocturne agit-il sur les pratiques de soins ? Que révèle-t-il ?

L’hôpital est un des rares espaces qui vit la nuit alors que le reste du monde est endormi. Le travail de nuit à l’hôpital se justifie par la permanence et la continuité des soins. A ce titre, c’est un sujet exploré sur le plan organisationnel et celui de la santé au travail. Toutefois, il semble être peu investi sous un angle éthique. Loin des cas exceptionnels ou médiatisés, penchons-nous sur un environnement spatio-temporel ordinaire qui peut révéler tensions et contradictions  susceptibles d’influencer les pratiques de soin sur le plan éthique. S’agit-il d’un univers facilitant les actes transgressifs ou générant, au contraire, des comportements allant dans le sens de l’émergence d’une éthique des soins ?

Quels sont les professionnels concernés par le travail de nuit à l’hôpital et comment se perçoivent-ils ? Quels sont leurs rôles ? Sont-ils sentinelles, guetteurs, veilleurs, contrôleurs … ? Sont-ils autres, sont-ils plus ? Les soins peuvent-ils être assurés de la même façon que durant la journée ? Les soignants peuvent-ils assumer la somme de leurs charges ou doivent-ils aller au plus urgent ? Mais aussi, en quoi la nuit forme (ou déforme)-t-elle ? Y a-t-il des savoirs spécifiques qui lui sont liés et lesquels ?

La dimension nocturne révèlera-t-elle une face cachée du soin ? En apparence, le monde de la nuit semble un monde réduit, appauvri. En réalité, il s’agit peut-être d’un monde constitué de richesses qui n’apparaissent pas à ceux de jour mais qui se révèlent à ceux de la nuit. De quel monde parle-t-on en abordant le travail de nuit : est-ce un monde minimisé ou démultiplié (démultiplication des sensations et des émotions) ?

Qu’en est-il de la relation soignant-soigné dans l’ombre et le silence de la nuit, dans cet environnement désert, artificiellement éclairé, qui se caractérise par un nombre moindre, voire une absence de contacts (avec les équipes, l’encadrement, l’institution, les proches). Est-elle une relation appauvrie, réduite ou plus riche ? S’agit-il de la même relation ou d’une autre relation ? L’hôpital la nuit est-il un espace différent ? Un temps différent ? Peut-on prendre le temps la nuit, ce temps qu’on ne prend plus le jour ? Quelles sont les conséquences sur les métiers soignants et le sens donné au travail ? Travail artificiel ou essentiel ?

Le contexte nocturne variera selon les secteurs de soins : certains devant faire face à des moments d’intensité et  adapter leur fonctionnement  au flux irrégulier des tâches, d’autres permettant la possibilité de se reposer. Quel(s) monde(s) constitue(nt)-t-il : quels codes, quelles routines, quelles spécificités, quelle identité ?

Pour le patient, que représente la nuit ? Ce moment de séparation avec le monde social trace une frontière symbolique qui le sépare du jour, du dedans et du dehors. Elle marque la fin des activités, du quotidien et enferme le patient dans un espace où ses repères peuvent être perturbés. La nuit augmente-t-elle la fragilité ? Comme pour le contexte et pour les professionnels, les figures sont diverses : le patient qui n’aspire qu’à dormir et dont le sommeil sera gêné par les visites de contrôle ou le voisin, celui qui attend l’hospitalisation dont l’inquiétude peut se transformer en panique au cœur de nuit quand chaque pas résonne et chaque bruit inquiète, celui qui souffre accompagné d’un proche pour l’apaiser, le patient en réanimation, dans un environnement qui délivre les mêmes activités que le jour avec ses lumières et ses bruits, la personne aux urgences qui appelle un secours … La solitude, le calme, l’expérience de la douleur, les sursauts de conscience, le besoin de confidence nécessitent qu’on lui porte attention. Quelle attention et comment la porter ? Dans le silence des lieux, des liens se créent-ils ? De quelle nature ?

OBJECTIFS :

  • Organiser un colloque sur le travail de nuit, sur la base de contributions scientifiques (histoire, filmographie, littérature …) et de témoignages. Ce colloque aura lieu le 26 janvier 2016Informations pratiques et inscription au colloque 
  • Proposer une publication.
  • Proposer des sujets de recherche.