Le texte instituant l'aide à mourir voté par l'assemblée nationale est en ligne

L’examen au parlement d’un premier projet de loi avait été interrompu par la dissolution de l’Assemblée Nationale le 9 juin 2024, mais un texte similaire a été adopté en première lecture par la nouvelle Assemblée le 27 mai 2025 instaurant un droit à l’aide à mourir.

Le droit à aide à mourir (AAM) est défini comme suit :

« Le droit à [l’AAM] consiste à autoriser et à accompagner une personne qui en a exprimé la demande à recourir à une substance létale, […], afin qu’elle se l’administre ou se la fasse administrer par un médecin ou par un infirmier ».

Les conditions d’éligibilité sont

  • (1)° Être âgé d’au moins dix-huit ans ;
  • (2)° Être de nationalité française ou résider de façon stable et régulière en France ;
  • (3)° Être atteint d’une affection grave et incurable, quelle qu’en soit la cause, qui engage le pronostic vital, en phase avancée ou terminale ;
  • (4)° Présenter une souffrance physique ou psychologique liée à cette affection, qui est soit réfractaire aux traitements, soit insupportable selon la personne lorsque celle-ci a choisi de ne pas recevoir ou d’arrêter de recevoir un traitement ; et
  • (5)° Être apte à manifester sa volonté de façon libre et éclairée. Une collégialité de type expertale, sur dossier, est prévue pour vérifier ces conditions. Une clause de conscience pour les soignants est instituée, de même qu’un délit d’entrave, tous deux calqués sur la législation sur l’interruption volontaire de grossesse.

La dépénalisation est assurée par l’article 122-4 du code pénal, « N'est pas pénalement responsable la personne qui accomplit un acte prescrit ou autorisé par des dispositions législatives ou réglementaires. ». Théoriquement, il n’y a pas de légitimation de l’AAM puisque le Code pénal lui-même n’est pas modifié.

Il n’est pas possible de discuter en détail un projet de loi qui n’a pas terminé son parcours parlementaire et dont la portée peut encore être modifiée par des amendements ou des décrets d’application. Mais plusieurs commentaires peuvent être faits dès à présent.

Les députés ont fait de l’ajustement envisagé par le CCNE « pour de rares patients » un véritable droit-créance que l’Etat aura le devoir de rendre accessible à tous et, possiblement dans certaines conditions, en alternative à toute tentative de traitement.

L’inscription de l’AAM dans le Code de la santé publique la place dans la catégorie des soins ce que contestent certains d’un point de vue conceptuel, d’autant qu’il s’agit là d’une obligation de résultat et non de l’usuelle obligation de moyen. Théoriquement, à ce titre, elle devra faire l’objet d’une politique de santé publique évaluée en termes d’efficacité et de coûts dont on perçoit immédiatement le caractère potentiellement dystopique. Enfin, les plus inquiets craignent l’effet de légitimation du fait de donner la mort pour soulager des souffrances, même par exception, ne change la représentation sociale de ceux qui souffrent et ne demandent rien. Ils craignent la disparition du fondement du devoir de compassion pour des patients qui apparaîtrons alors comme refusant la « solution » prévue par la société.

D’autres, au contraire, en appellent déjà à l’extension de ce dispositif aux mineurs, aux personnes âgées estimant qu’elles ont accompli leur vie, et aux déments qui en auraient fait la demande anticipée.