Conditions sanitaires minimales d’accueil dans les établissements scolaires

Cette note du conseil scientifique transmise aux autorités nationales le 24 avril a pour objectif d’indiquer les conditions sanitaires minimales d’accueil dans les établissements scolaires et les modalités de surveillance des élèves et des personnes fréquentant ces établissements à partir de la rentrée des classes du 11 mai 2020.

Dans cette note, le conseil scientifique qui préconisait la fermeture des établissement scolaires jusqu'au mois de septembre prend acte de la décision de réouverture le 11 mai et rappelle qu'il incombe aux autorités de s'assurer que les mesures sanitaires soient opérationnelles au moment de l'ouverture de chaque établissement scolaire et d'assurer la coordination entre l'éducation nationale et les autres acteurs intervenant en milieu scolaire (mairies, conseils départementaux, conseils régionaux…) 


  Modalités de réouverture des écoles à partir du 11 mai : prérequis et préconisations

Le Conseil scientifique est favorable à ce que le principe de volontariat et de non obligation de la part des familles soit retenu, avec la possibilité d'une poursuite de l'enseignement à distance.

1. Information et formation

Il appartient aux autorités de fournir pour l'ensemble du personnels des établissements scolaires et pour les parents le matériel d'information et de formation.

  •  Les parents devront être informés clairement des conditions d'ouverture de l'établissement, notamment si " le principe de volontariat et de non-obligation " est retenu, et de leur rôle actif dans la surveillance de l'apparition de symptômes chez leur enfant et des moyens mis en oeuvre pour le diagnostic en cas de symptômes. L'information des parents pourra se faire grâce à une vidéo et à une lettre explicative contenant les symptômes évocateurs d'une infection COVID-19 chez l'enfant, les numéros de téléphones utiles pour obtenir des renseignements et les lieux prévus pour effectuer le prélèvement diagnostique en cas de symptômes évocateurs de COVID-19. Les associations de parents d'élèves devront être impliquées.
  •  Les enseignants, le personnel de direction, le personnel éducatif ainsi que tous les agents des établissements scolaires devront être formés aux mesures barrières, aux règles de distanciation sociale et au port du masque pour eux-mêmes et pour les enfants dont ils ont la charge le cas échéant. Cette formation devra être adaptée à l'âge des enfants dont ils ont la responsabilité. Il pourrait s'agir d'un diaporama avec une narration.
  •  Le jour de la rentrée les enfants devront bénéficier d'une information pratique sur la distanciation sociale, les mesures barrières et l'hygiène des mains. Cette éducation devra être adaptée à l'âge des enfants (jeux, vidéos...).

2. Entrées et sorties des écoles

  • L'arrivée et la sortie des écoles doivent être organisées afin d'éviter le rassemblement des enfants et des parents à l'entrée des établissements scolaires. Les horaires d'arrivée et de sortie des classes pourront par exemple être échelonnés pour que les élèves d'un même niveau ne croisent pas les élèves d'un autre niveau.

3. Aménagement et entretien des établissements scolaires

  • Les établissements scolaires devront être aménagés de façon à ce que les conditions sanitaires minimales détaillées plus bas soient réunies.
  • Chaque élève et chaque membre du personnel des établissements scolaires doit être en mesure de procéder à un lavage des mains (eau, savon liquide, papier à usage unique) au minimum à l'arrivée à l'école avant le début de la classe et à la fin des cours, avant et à la fin de chaque repas et chaque fois que les mains auront pu être souillées par des liquides biologiques. La fourniture de solution hydroalcoolique peut être envisagée pour les élèves à partir du collège. Le Conseil scientifique considère que la mise à disposition de solution hydroalcoolique pour des élèves avant le collège peut être dangereuse (absorption, projection oculaire...). Le Conseil scientifique rappelle que les solutions hydroalcooliques ne peuvent pas remplacer un lavage à l'eau et au savon en cas de mains potentiellement souillées par des liquides biologiques.
  • Un bionettoyage de l'établissement (salles de classe mais aussi parties communes) en insistant sur les zones fréquemment touchées (poignées de porte, interrupteurs par exemple) devra être réalisé plusieurs fois par jour avec les produits adéquates et au mieux avec des lingettes désinfectantes pour les surfaces. Le bionettoyage de la classe sera renforcé si un élève est testé positivement pour le COVID-19. Une aération des salles de classes est préconisée, en particulier lors des temps de pause (récréation, déjeuner, changement de salle de classe).
  • Une éducation et une pédagogie concernant la prévention peut être accompagnée sur le territoire par les médecins de proximité et les médecins de PMI dans le cadre de réunions sur les territoires en collaboration les responsables d'établissements

4. Adaptation des règles de distanciation sociale en milieu scolaire

  • La règle de distanciation sociale dont le principe est le respect des distances minimales (1 mètre au moins de chaque côté notamment pour les tables) permet d'éviter les contacts directs une contamination respiratoire et par gouttelettes. Elle devra être respectée dans tout l'établissement scolaire (salle de classe, couloir, escalier, réfectoire ...). Le Conseil scientifique encourage la communauté éducative à faire respecter cette règle pour l'ensemble des niveaux, mais est conscient de la difficulté que cela représente, notamment pour les classes de maternelle.
  • Si l'espace dans l'établissement est insuffisant pour accueillir les enfants avec les normes sanitaires qu'impose la distanciation sociale, les établissements scolaires devront réfléchir avant ouverture au rythme auquel ils peuvent accueillir les enfants dans de bonnes conditions sanitaires (un jour sur deux, 1 semaine sur 2, le matin vs. l'après-midi...°). Il n'appartient pas au conseil scientifique de fixer le rythme d'accueil des enfants qui doit avant tout dépendre du programme scolaire.

5. Stratégie visant à réduire le brassage des élèves dans les établissements scolaires

Cette stratégie vise à limiter la fermeture de tout un établissement en cas de découverte d'un cas positif :

  •  Les établissements scolaires devront réfléchir avant leur réouverture et en fonction de la taille de l'établissement à l'organisation de la journée et des activités scolaires (entrée en classe, sortie des classes, déplacements dans l'établissement dans les couloirs, récréation...) afin qu'au mieux, les élèves d'une classe ne croisent pas les élèves d'une autre classe ou que les élèves d'un même niveau ne croisent pas les élèves d'un autre niveau. Cette organisation permettra de ne pas fermer l'ensemble d'un établissement si un cas est identifié dans l'établissement.
  •  Si cela est possible, le Conseil scientifique préconise que les enfants mangent dans la salle de classe à leur table.
  •  Les temps de récréation devront être adaptés à cette stratégie de non brassage des élèves.

6. Le rôle des parents

  • Les parents devront veiller à ce qu'une hygiène stricte des mains soit réalisée au retour à la maison.
  • Outre la surveillance de l'apparition de symptômes chez leur enfant, les parents seront invités à prendre la température de leur enfant avant le départ pour l'école. En cas de symptômes évocateurs, l'enfant ne devra pas se rendre à l'école et les parents devront prendre avis auprès du médecin traitant pour décider ou non de recourir à un test RT-PCR.
  • A noter, afin de ne pas multiplier les cas contacts, les parents ne pourront pas pénétrer dans l'enceinte de l'établissement scolaire. L'accueil des enfants les plus petits devra être organisé de façon à ce qu'il n'y ait pas d'attroupement de parents à l'entrée de l'établissement scolaire.

7. Le port du masque

  •  Des masques alternatifs de production industrielle ou artisanale antiprojection devront être portés par les personnels des établissements scolaires et par tous les enfants à partir du collège. Le Conseil scientifique considère que pour les collégiens/lycéens pour lesquels la compréhension est bonne et l'éducation au port de masque est possible, le port de masque doit être obligatoire.
  •  Pour les élèves en école de maternelle le port de masque est impossible. Pour les élèves en école de l'élémentaire, il existe un continuum de compréhension en fonction de l'âge sans que l'on puisse précisément fixer un âge où la compréhension serait suffisante pour recommander le port du masque de façon adaptée, d'autant qu'ils apparaissent comme faiblement transmetteurs. Le rôle des parents est ici essentiel.
  • Lorsqu'ils ne peuvent pas porter de masque, notamment pendant les repas, les élèves et le personnel des établissements scolaires devront s'organiser pour respecter la règle de distanciation sociale.

8. Les personnels des établissements scolaires ou de transports scolaires à risque de formes graves

  • Ces personnels relèvent des principes précisés dans l'avis 6 du 20 avril 2020 du Conseil scientifique concernant les " personnes en activité présentant des facteurs de risque ". Ils sont rappelés ci-dessous.
  • Le Conseil scientifique préconise qu'une évaluation individuelle du risque soit réalisée par le médecin traitant avant le 11 mai pour ces personnels en ALD, recevant un traitement au long cours, ou estimant être à risque. Cette évaluation devra tenir compte de la pathologie et des traitements reçus ainsi que de la situation géographique (circulation active ou non du virus). Le Conseil scientifique considère que dans l'état actuel des connaissances, le télétravail doit être favorisé pour cette catégorie de personnel mais qu'il est possible, en fonction de l'évaluation individuelle du risque d'envisager un travail en présentiel. Le médecin du travail doit alors s'assurer que les mesures barrières sont strictement respectées sur le lieu de travail.

9. Les transports scolaires

  • Les règles de distanciation sociale doivent s'appliquer aux transports scolaires. Une multiplication de l'offre devrait permettre de réduire la densité des élèves dans ces transports scolaires.

10. L'organisation du périscolaire

  • Ces activités périscolaires sont essentielles à mettre en oeuvre et doivent bénéficier d'une attention particulière.
  • Le temps périscolaire implique un brassage des enfants et il devra être contrôlé et organisé. Dans le cas d'un enfant participant à des activités périscolaires découvert positif, la recherche de cas contacts devra se faire parmi les enfants de la même classe et chez les enfants ayant participé aux même activités. Si plusieurs enfants contacts sont positifs, la fermeture de l'établissement pourra se discuter au cas par cas.

11. Cas particulier des internats

  • Les internats pourront accueillir des élèves à condition que les règles de distanciation sociale puissent être appliquées.
  • Le Conseil scientifique considère que s'agissant d'un lieu de vie en collectivité seuls les élèves pour lesquels le retour à l'école est un impératif (scolaire ou social) devraient être accueillis dans ces établissements.
  • Avant la réouverture de ces établissements scolaires, une réflexion spécifique doit être menée afin d'organiser l'enseignement technique (travaux pratiques en atelier) pour qu'il permettre le maintien de la distanciation sociale et évite le partage des postes de travail.

12. Cas particuliers des lycées professionnels

  • Avant la réouverture de ces établissements scolaires, une réflexion spécifique doit être menée afin d'organiser l'enseignement technique (travaux pratiques en atelier) pour qu'il permettre le maintien de la distanciation sociale et évite le partage des postes de travail.

13. Cas particulier des élèves relevant de la maison départementale des personnes handicapées (MDPH) et/ou des unités localisées d'inclusion scolaire (ULIS)

  • Une attention particulière doit être portée aux enfants en situation d'handicap. Une réflexion spécifique doit être menée afin de permettre à ces élèves d'être accueillis à partir du 11 mai dans les mêmes conditions de sécurité sanitaire que les autres. Il sera aussi important d'adapter l'information et l'apprentissage des règles barrières de ces enfants, en prenant en compte leur handicap (visuel, cognitif, moteur....

14. Tests diagnostiques (RT-PCR) et sérologiques

  • Le Conseil scientifique considère qu'un dépistage massif par test diagnostique RT-PCR des élèves et de l'ensemble du personnel travaillant dans les établissements scolaires n'est pas envisageable : il concernerait plus de 14 millions de personnes et devrait être renouvelé régulièrement (tous les 5-7 jours) pour détecter des cas et empêcher efficacement la circulation du virus dans un établissement.
  • Le Conseil scientifique considère que les tests sérologiques au moment de la rentrée du 11 mai n'ont pas d'intérêt individuel ni pour les élèves ni pour les personnels des établissements scolaires (cf. avis du 20 avril 2020 du Conseil scientifique). Ces tests pourront être proposés dans certaines écoles dans un but épidémiologique.

15. Gestion d'un cas suspect dans un établissement scolaire

  • L'organisation pour la gestion d'un cas suspect devra être mise en place avant le 11 mai et devra être connue des parents et des personnels des établissements scolaires.
  • Tout symptôme évocateur d'infection COVID-19 chez un enfant constaté par le personnel de l'établissement scolaire doit conduire à l'éviction immédiate de l'enfant. En cas de doute sur les symptômes d'un enfant, une prise de température pourra être réalisée par un enseignant ou l'infirmière scolaire. Le Conseil scientifique ne préconise pas de prise systématique de la température des élèves considérant que cela n'élimine pas l'infection ce d'autant que la prise de température à un grand nombre d'enfants est difficile à réaliser sans rompre les règles de distanciation sociale.
  • En cas de symptômes évocateur, les parents de l'enfant seront avertis et devront assurer la réalisation d'un test de dépistage chez leur enfant dans un centre prévu à cet effet. L'enfant ne peut pas être accepté de nouveau à l'école sans le résultat de ce test. 
  • Les mêmes principes que ceux énoncés dans l'avis 6 du Conseil scientifique du 20 avril 2020 s'appliquent pour les enfants scolarisés. Toutefois, s'agissant d'enfants le Conseil scientifique se doit de souligner deux particularités : (1) La particularité de la technique de prélèvement pour le test diagnostique chez les jeunes enfants (de la maternelle au CM2) (cf. Procédure en annexe) et(2)L'isolement des cas revêt un caractère particulier s'agissant d'enfants le plus souvent mineurs […].

 16. Grands principes en cas de détection d'un cas avéré dans un établissement scolaire

  • Lorsqu'un cas est identifié dans un établissement scolaire, les mesures suivantes doivent être mises en œuvre :

 - Diagnostic le plus précoce possible de tous les élèves de la même classe ou de toutes les classes du même niveau en fonction de l'organisation retenue par l'établissement scolaire. Ce dépistage se fera au sein de l'établissement scolaire en impliquant une équipe mobile dédiée la plus proche avec au moins un professionnel habilité et formé au prélèvement chez les enfants les plus jeunes et un psychologue pour la prise en charge des enfants, de leur famille et des enseignants.

 - Fermeture de la classe ou de toutes les classes du même niveau en fonction de l'organisation retenue par l'établissement scolaire avec éviction des élèves concernés pendant 14 jours.

 - Le processus opérationnel de suivi et d'isolement décrit dans l'avis 6 du Conseil scientifique du 20 avril 2020 est ensuite mis en place.